Depuis l’adoption de la Déclaration des droits des personnes handicapées par l’ONU en 1975, le handicap est passé d’une approche médicale et individuelle à une approche sociale. C’est aujourd’hui un enjeu de société qui pose des problèmes d’éthique et fait l’objet de politiques publiques. La loi du 11 février 2005 pour l’égalité des droits et des chances admet pour la première fois en France que c’est la société qui doit s’adapter aux personnes en situation de handicap et non l’inverse. Bien que des solutions de compensation soient offertes, de nombreuses inégalités subsistent, notamment en terme d’accessibilité et plus particulièrement en terme d’accessibilité et d’usage des technologies numériques. Celles-ci se sont banalisées (Scardigli, 1989) dans notre quotidien et dans notre vie professionnelle sans tenir compte de ces publics fragilisés. Or des difficultés d’accès et d’appropriation engendrent des inégalités numériques (Granjon, 2009).
Les études menées au sein de l’équipe E-inclusion du CREAD (Centre de recherche sur l’éducation, les apprentissages et la didactique) nous montrent que ces inégalités peuvent être, pour partie, le prolongement d’inégalités sociales : les personnes isolées, les personnes ayant un faible niveau d’étude et un faible revenu, les seniors et les demandeurs d’emplois sont nombreux à en être exclus. Les personnes en situation de handicap mental et/ou psychique sont confrontées à ces inégalités sociales et nous avons pu observer lors de nos précédentes recherches qu’elles sont e-exclues. D’autre part, il apparaît de plus en plus clairement que nous ne sommes pas tous égaux devant les technologies. Certaines personnes peuvent rencontrer des difficultés à sélectionner et à produire de l’information, à apprendre en permanence et à jouer un rôle actif dans la société de l’information*. Les personnes en situation de handicap mental et/ou psychique sont confrontées à ces difficultés. Sans accompagnement, elles ne peuvent pas bénéficier des effets positifs associés aux usages des technologies numériques, tels que le renforcement de l’estime de soi, la mise en mouvement des capacités et la participation à la vie sociale (Plantard, 2011). Pour réduire ces inégalités et les risques d’exclusion qui en découlent, l’e-inclusion a pour principaux objectifs d’accompagner ces personnes e-exclues dans un processus d’appropriation afin qu’elles tirent profit de l’usage des technologies numériques pour s’insérer socialement et professionnellement et de s’appuyer sur ces nouveaux usages comme levier de transformations individuelles et collectives.
Dans le cadre d’une recherche-action au sein des Établissements et services d’aide par le travail (ESAT) de l’Association départementale des amis et parents de personnes handicapées mentales de l’Ille et Vilaine (Adapei 35), nous avons étudié les processus d’appropriation personnels, professionnels et institutionnels des technologies numériques. Nous avons également recherché et analysé les facteurs limitant l’accès et l’usage des technologies numériques par les travailleurs en situation de handicap mental et/ou psychique. Nos objectifs étant de diffuser les usages de ces technologies au sein des 6 ESAT du département, d’adapter les méthodes pédagogiques et les instruments en fonction des aptitudes de chacun et de favoriser l’insertion professionnelle. Suite à cette recherche nous proposons une méthodologie d’introduction de ces instruments auprès des professionnels du handicap mental*’.
* Charte pour l’inclusion numérique et sociale, (2004), Barcelone, (en ligne), http://charte.velay.greta.fr/
*’ Ce projet a été financé par le conseil régional de Bretagne, dans le cadre de l’appel à projets de recherche M@rsouin